Canadian Journal for Traditional Music (1995)

La tradition musicale des Franco-Acadiens de Terre-Neuve: une etude descoptive

Gary R Butler

Les Franco-Acadiens de Terre-Neuve habitent la région de la baie Saint-Georges/presqu'île de Port-au-Port, sur la côte occidentale de l'île. C'est un peuple qui, depuis maintenant plus de deux cents ans, poursuit une vie traditionnelle de petit pêcheur/fermier domestique dans le contexte d'une culture d'expression principalement orale. La culture de la population française de Terre-Neuve résulte d'une série de circonstances historiques complexes qui ont façonné un contexte social menant au développement d'un groupe à la fois typiquement canadien-français et uniquement franco-terreneuvien. Depuis la fin du XVIIIe siècle, des familles acadiennes de la Nouvelle-Écosse, plus précisément de l'île du Cap-Breton (autrefois l'île Royale), se sont installées à l'intérieur de la baie Saint-Georges, située sur la côte occidentale de la province. Moins d'un siècle plus tard, des pêcheurs originaires du nord de la France faisant partie de l' équipage des bâtiments de pêche français ont corn-mencé à déserter leurs vaisseaux pour chercher une vie nouvelle au sein de la colonie acadienne. De ces deux vagues de colonisation française est issue une culture traditionnelle basée sur 1' agriculture domestique la petite pêche sédentaire de la morue. Un troisième élément dont il faut tenir compte est la présence d'une population croissante de colons d'origine écossaise et anglaise, et dont la culture et la langue ont eu une influence considérable sur l'évolution de cette vie traditionnelle.

A l'instar des populations régionales françaises en Amérique du Nord, les Franco-Terreneuviens ont tenté, malgré les forces assimilatrices qui les ont souvent menacés, de résister et de rester fidèles aux traditions et à la langue de leurs aïeux. Autrefois, ces forces assimilatrices ont favorisé l'occultation des ressources disponibles pour la préservation et la promotion de la minorité francophone de Terre-Neuve; néanmoins, malgré l'influence croissante de la culture dominante anglaise, les franco- terreneuviens ont gardé un fort attache-ment à leur patrimoine vivant, dont la langue et les traditions de leurs aïeux. Et même si des programmes fédéraux aient récemment freiné ce déclin, reste à voir s'il est encore possible de renverser l'impact négatif de plus de 150 ans de mépris et d'injustice envers les francophones de la côte ouest.

L'histoire des Franco-Terreneuviens commence à la fin du dix-huitième siècle, mais très peu de recherches sur leur tradition musicale ont été entrepris. En 1929, Elisabeth Bristol Greenleaf et Grace Yarrow Mansfield ont effectué des enquêtes intensives sur la côte ouest de Terre-Neuve. Cependant, bien que Greenleaf note qu'elle était étonnée, lors d'une visite à la péninsule Port-auPort, d'entendre des chansons traditionnelles «sung in literary French which I could understand» (xxv), aucun exemple de ces musiques folkloriques n'est mentionné dans ses publications. En 1964, John T. Stoker, alors directeur du Département de français à l'Université Memorial de Terre-Neuve, proclama, à tort, que la population francophone n'avait engendré aucune culture, originale ou traditionnelle, et qu'il y avait peu de traces de chansons folkloriques, de contes populaires, ou d'artisanat: «[the French population] produced no culture, either native to Newfoundland or handed down, and there seems to be little or no trace offolksongs or folktales, arts or crafts»(358). Cette évaluation pessimiste et notoirement trompeuse de l'état soi-disant dé térioré de la culture franco-terreneuvienne aurait pu décourager la poursuite des recherches, mais heureusement les déclarations de Stoker furent bientôt contrées. En 1965, l'ethnomusicologue Kenneth Peacock fit publier une étude sur la chanson traditionnelle à Terre-Neuve; parmi les centaines de textes répertoriés figuraient plus de quarante chansons folkloriques françaises recueillies sur la côte ouest de l'île. Aujourd'hui, le nombre de chansons folkloriques françaises collectionnées dans la région s'élè ve à plus de deux cents.

Malgré ces démarches préliminaires, ce n'est véritablement qu'à partir des années soixante-dix que furent entreprises des recherches approfondies et rigoureuses sur la culture traditionnelle franco-terreneuvienne. Pendant cette période, Gerald Thomas, fondateur et directeur du Centre d'études franco-ter-reneuviennes (CEFT) à l'Université Memorial, a complété une étude sur la tradition narrative des contes populaires parmi les francophones de la presqu'île de Port-au-Port (1983). En 1978, son catalogue des chansons folkloriques franco-terreneuviens fut publié par le département de folklore de 1' Uni versité Memorial.

Les données sur lesquelles repose le présent ouvrage ont été recueillies entre 1979 et 1985, totalisant l'équivalent de presqu'un an dans la région de la presqu'île de Port-au-Port. L'essentiel de la collecte a porté sur des renseigne-ments culturels et sociaux à titre de participant-observateur. Pour ce faire, après mon «initiation» dans la communauté, j'ai essayé de m'intégrer autant que possible à la vie quotidienne des gens. Bien sûr, ma participation était limitée par des considérations d'ordre pratique et culturel, mais les habitants ont vite accepté ma présence. Ayant compris pourquoi je m'intéressais à leur vie, à leur culture et à leur langue, et possédant eux-mêmes un sens inné de l'importance potentielle de ce genre de recherches, ils ont accepté, presque sans exception, de faire l'impossible pour coopérer. Ainsi, j ' ai pu recueillir presque cent heures d'enregistrements sonores et écrire quelques centaines de pages de notes manuscrites traitant de nombreux aspects de la culture traditionnelle franco-terreneuvienne, y compris bien sûr, la tradition musicale.

La Tradition Musicale

La musique instrumentale et les chansons traditionnelles en langue française ont toujours joué un rôle important dans la vie sociale des Franco-Terreneuviens. Avant l'avènement de l'électricité dans la région au début des années soixante, il allait de soi que les danses et fêtes se déroulaient au son d'instruments non amplifiés. Les plus usités étaient le violon, l'accordéon à boutons et l'harmonica (la musique à bouche), quoique celui-ci ait été moins courant. Plus récemment, avec l'engouement pour la musique Country et Western, la guitare s'est imposée de plus en plus, au point d'éclipser tous les autres instruments, surtout parmi les jeunes. Cependant, malgré le choix d'instruments et le nombre de musiciens doués, les chansons traditionnelles n'étaient presque jamais accompagnées. En effet, l'absence d'accompagnement faisait partie de l'esthétique de ce genre musical. Quand on chantait, on chantait seul, car les auditeurs voulaient écouter la chanson dans une voix qui leur était familière. Les occasions de chanter étaient multiples et variées. On chantait pendant les veillées, les réunions de famille ou les visites de voisins. On chantait au travail, à la pêche, aux bûcheries et aux frolics. On chantait aussi pour endormir les enfants.

Les Chansons Traditionnelles

A l'instar de la tradition du conte populaire, la tradition musicale comportait une double dimension publique et privée. Selon l'usage de Thomas (1983), il existe deux traditions: la «tradition publique», c'est-à-dire celle où l'artiste, devant une assistance adulte assez grande, pratique son art en interprétant de longues chansons traditionnelles, et une tradition en vertu de laquelle les parents chantent à leurs enfants les vieux airs folkloriques appris dans leur jeunesse. Avec la disparition de la tradition publique, cette tradition familiale (ou «privée» selon la terminologie de Thomas) devenait tout ce qui, de nos jours, assurait la préservation et la transmission de cette composante importante de la culture orale franco-terreneuvienne. Plus récemment, la popularité des fêtes folkloriques dans la région a fait renaître l'exécution publique des chansons traditionnelles.

A l'époque des veillé es, nombreux étaient ceux qui connaissaient des chansons traditionnelles, mais seuls quelques-uns étaient reconnus comme de «vrais chanteurs», et c'était sur eux que l'on comptait pour animer les veillées. Décrire en détail les caractéristiques du «vrai chanteur» dépasserait ici le cadre de l'étude. Contentons-nous de dire qu'il fallait, en général, connaître un grand répertoire de chansons longues, préférablement de provenance européenne, avec une voix forte et résonnante. C'était la marque de chanteurs renommés, Français d'origine; les enfants et petits-enfants ont ainsi appris les chansons de leurs aïeux:

La fille à, la femme à Lacosta au Cap là. La femme au Raphael Lacosta, c'est la fille à Dubé, elle chantait bien aussi, une tapée de chansons françaises, elle. C' était une bonne chanteuse.... Elle commence à vieillir aussi à présent là. Mais elle chantait bien.... Oui. Elle savait joliment des chansons françaises, elle. Son père était un chanteur, vois-tu, le vieux Dubé là. Oh oui. Mon défunt père me disait là qu'il n'avait pas de conduite là, tu sais? Il m'a dit s'il aurait eu du conduite, cet homme-là, il aurait été, il aurait fait une grande vie dans le, dans le théâtre. C'était un vrai chanteur. (Joseph Bozec)

Quand on chantait des airs traditionnels, on prenait soin d'en préciser les sources, car, à l'instar des narrations, certaines chansons étaient associées àdes individus et donc considérées comme leur «propriété». Certains avaient réussi à apprendre les chansons, les ayant entendues maintes fois par l'inter-médiare des parents; d'autres faisaient preuve d'un don exceptionnel pour l'apprentissage des paroles:

Trois fois! Oui! Elle pouvait être aussi longue comme qu'elle voulait. Et puis une, une gigue comme un reel là? J'ai jamais pu apprendre un! Non. Une chanson, il y a en masse des chansons que j'aurais entendues rien que deux fois puis je, je les avais. Mais trois fois le plus. Oui. (Joseph Bozec)

Un autre lieu d' apprentissage de chansons traditionnelles françaises se trouvait dans les chantiers de Terre-Neuve et du Québec, où l' on côtoyait des bûcherons québécois et acadiens.

Ça, j ' ai appris au Canada aussi, dans le bois. Oui, dans les camps. . . .Oh, entendre les autres chanter. Oui. J' ai j amais eu une d' écrit. . . . Oh, cinquante ans de ça, cinquante ans. Cinquante-trois, cinquante-trois ans de ça.... Oui, je me rappelle la première chanson que j'avais apprise, quand j'avais quatre ans. Oui. En anglais. Quatre ou cinq, pas plus. (Joseph Bozec)

Les chanteurs de la tradition privée, qui par définition ne chantaient pas aux veillées, se produisaient en famille, ou au travail:

Oui. Mon défunt père chantait bien. Oh oui. Oui, lui, il chantait au large là, puis il avait un grand canot à voile. Il y avait, c'est pas, il y avait pas grand-monde qui avait des engins dans ce temps-là, c'est plutôt des canots à voile qu'ils aviont. Ça fait, il avait un grand canot à voile puis..., j'étais tout jeune dans ce temps-là. Quand il, quand il halait ses trawis là pour, la trawl, bien, il chantait, eh. Puis moi, j'étais couché là, il y avait un banc, j'étais assis sur le bateau là pour gouverner son canot. Moi, je me couchais, tu sais, puis lui, il halait ses trawis puis il chantait. C'était beau. Puis là, je, je tombais endormi! Puis quand je me réveillais, j'étais rendu ici à la côte [rit]. Oh, il chantait bien! Il chantait haut, ils l'entendiont de la terre. Oui, j 'étions comme un mille au large, ils, ils l'entendiont, il y pensait pas. (Pierre Secardin)

Les Chanteurs et Leurs Chansons

Parmi les chanteurs franco-terreneuviens les plus connus de la région, le nom de Joséphine LaCosta (née Dubé) figure au premier rang (Ex. 1). Madame LaCosta (ou LeCostard) est née en 1904 à La Grand'Terre, fille de Théophile Dubé, originaire de La Rochelle, en France. Tous ses grands-parents étaient des chanteurs de talent, si bien que madame LaCosta a été élevée dans la tradition musicale depuis son enfance, et elle a commencé à chanter à l'occasion de veillées de nuit à 1' âge de 14 ans. A l'âge de 17 ans, elle a épousé Raphael LaCosta de Cap-Saint-Georges, où elle a vécu jusqu'à sa mort en 1982. Les chansons de Joséphine LaCosta étaient typiques de la tradition musicale de son époque. Bien qu'elle ait connu des chansons anglaises, elle préférait chanter «les vieilles chansons françaises de France», surtout «les vieilles chansons longues» et «des marches». Son important répertoire comprenait surtout des chansons qu'elle avait apprises de ses aïeux venus de France.1

Joseph Bozec est né à L'Anse-à-Canards en 1904, fils d'Yves LeBozec, originaire du village de Guilvinec, dans le canton de Quimper, en Bretagne, et de sa femme Sarah, de La Grand'Terre (Exx. 2-4). Monsieur Bozec a appris la plupart de ses chansons pendant ses années de travail dans les chantiers du Québec et de Terre-Neuve. Selon lui, même s'il n' a jamais eu une bonne mémoire pour les récits (bien qu'il en connaisse des douzaines), il signale qu'il ne lui fallait écouter que trois fois une chanson pour l'apprendre. Joseph Bozec, homme vif et comique, est toujours prêt à conter une blague ou un récit amusant «des vieux temps d'auparavant». Ce qui ne l'empêche pas d'avoir dans son répertoire un grand nombre de complaintes qu'il chante avec force et émotion.

Marie Félix est née en 1923, fille d'Amédée Benoit et d'Adéline Benoit de Maisons-d'Hiver (Exx. 5-7). Elle a vécu à L'Anse-à-Canards et c'est de ses parents, dans l'intimité du foyer, qu'elle a appris la plupart de ses chansons. Elle n'est pas une chanteuse «publique,» mais lorsqu'il y a une soirée ou des invités chez elle, il n'en faut pas beaucoup pour la persuader de faire un tour de chant pour l'assemblée, petit rituel qui est très courant d'ailleurs chez les Franco-Terreneuviens. La plupart des chansons de Madame Félix sont des complaintes qu'elle a apprises de son père. Elle chante notamment une version intégrale du «Juif errant».2

La Musique Traditionnelle et Les Danses

L'instrument le plus important dans la tradition musicale des Franco-Terrëneuviens est sans aucun doute le violon, aux côtés de l'accordéon à boutons; ce sont ces deux instruments qui accompagnaient autrefois les danses et les fêtes. Ou demandait surtout des violonneux, leur musique étant nécessaire aux danses carrées, aux gigues, aux reels et aux step dances. Ces musiciens traditionnels apprenaient leur art par imitation, c'est-à-dire, en observant les autres jouer et en travaillant ensuite la position des doigts sur l'instrument de leur choix.

J'ai appris ici et là, je jouais un petit peu là-bas, un petit peu là-bas. Oui, c'est de même que j'ai appris à jouer du violon....Bien non, j'écoutais Emile jouer là. Je l'écoutais puis je faisais attention....Oui, oui, j'essayais moi-même, ç'a venu après un bout. (Joachim Benoit: cf. Exx. 8-9).

De temps à autre, cette formation «sur le tas» produisait un musicien doué dont les compositions dépassaient les limites de la tradition locale. Tel fut le cas d'Émile Benoit de L'Anse-à-Canards.

Emile Benoit est né en 1913 et s'est intéressé à la musique à un très jeune âge (Exx. 10-12). Lorsque son oncle Jean jouait du violon, le petit Émile l'écoutait toujours avec attention. Son intérêt était tel que son père lui a fabriqué un petit violon en bois avec des cordes de coton et un petit archet. Pour trouver les bons accords, Émile «turlutait», c'est-à-dire chantonnait ou fredonnait l'air delachanson:

Bien, quand j'ai commencé, moi, bien, j'ai commencé avec le, le petit violon en planches là, eh? Qu'il m'avait fait avec un couteau de poche. Et puis je frottais là-dessus puis je chantais. Mais dame, je pouvais pas jouer parce ça, c'était pas de quoi que je pouvais jouer dessus. Mais ça faisait sonner, eh. Ça, c'était pareil, bien, c'était à l'entour comme, comme ça ici là. I-i-i-i-i-i-i-i! Ça sonnait comme ça. Je tapais des doigts mais il y avait rien. Mais dame, je pratiquais tout le temps, et je pratiquais. Puis le bras allait puis je chantais, eh. Puis quand j ' ai eu le violon après j'ai commencé à apprendre à jouer du violon, bien là, c'est, c'est, je chantais, je chantais aussi. Dans ces temps-là, il y avait pas d'amplifier, il y avait pas rien comme ça. Puis c'est des, dans les, dans les halls, dans les grands halls. Bien là, il fallait que ça chante, puis fallait que ça, ça joue pour tout entendre. Je jouais dur, moi, avant. Ça, c'était rough, ça.... Asteure, jejoue un petit peu plus doux, eh, c'est parce.... Mais dans ces temps-là, bien, je sais pas, fallait que ça sonne. Puis je chantais, ah. Je suis pas un bon chanteur, mais dame, eh, ça l'aide pour s'accorder, il fallait que ç'accorde, eh. (Émile Benoit)

Émile Benoit a rapidement appris les compositions traditionnelles du répertoire franco-terreneuvien et il a bé néficié par la suite d' une grande popularité comme animateur musical des soirées dansantes, aussi bien dans sa communauté que dans les autres autres villages de la région. Mais, en même temps, il avait un don pour l'originalité et ses compositions personnelles se comptent par douzaines. Dans les années soixante-dix, il a entrepris une carrière professionnelle et, en 1979, ii avait à son actif trois disques de musique originale et tradition-nelle. Avant sa mort en 1992, Émile Benoit avait participé à de nombreux festivals folkloriques à Terre-Neuve, en Acadie, au Québec, en Louisiane et en France.3

Les Danses

Les maisons étaient généralement trop petites pour accueillir de grandes danses carré es et le curé interdisait le plus souvent l'utilisation des locaux réservés àl'église pour ce genre de manifestation. Ainsi les danses avaient-elles lieu surtout dans l'école locale. En plus des chaises et des pupitres des élèves qu'il fallait mettre de côté, on devait se livrer à certains préparatifs, dont le nettoyage du plancher en bois. Pour ce faire, on se servait de sable blanc:

Du sable! Des brosses puis du sable. J'ai fait ça moi-même plus qu'un coup! Gee! Dans l'école là. On mettait le sable sur la place pour le faire blanchir la place. Oh, mais il fallait que la place était blanche. J'ai fait ça moi-même!... des places là, . guess! [Q: Vous cherchiez le sable sur la plage?] Non! Il y a un certain sable, le sa-ble blanc ! Non, le sable de la côte est pas bon. Fallait un certain sable. Sur la petite plaine en haut-là, là. Tu prenais le sable de là-dedans mais du sable blanc. Oui. Ils vont ramasser ça à l'automne pour l'hiver. Ils vont ramasser trois ou quatre gallons de ça pour l'hiver pour [rit] laver, laver des planchers....Le sable, le sable de l'eau salée est pas bon. Ç'aurait pas, ç'aurait pas blanchi la place. Oh non. Le sable blanc, grande différence là-dedans! Plus rough, plus dur! (Joseph Bozec)

Les danses où l'on était moins nombreux se déroulaient dans les maisons, parfois contre le gré de la propriétaire:

Il y a une année, moi, je travaillais, je travaillais avec la compagnie de Haliburton là. Je tenais la boutique, il y avait une petite boutique ici, tu sais? J'ai dit à mon, àmon neveu, mon neveu, j'ai dit j'avais pas le temps de couper tout mon bois d'hiver, vois-tu? Je dis, «Je m'en vais, je m'en vais faire une bûcherie.» Je dis, «Je, je veux sept à huit hommes pour ma bûcherie.» Bûcher mon bois d'hiver parce que j ' avais pas le temps moi-même. Vingt-trois qui a venu ! [rit] Vingt-trois hommes qui a venu, la jeunesse. Vingt-trois de la jeunesse qui a venu. Je lui ai pas demandé. [rit] Ils aviont su que j ' avais une bûcherie là. . . de venir. Ils vouliont avoir une danse au soir! (Joseph Bozec)

Les genres les plus populaires étaient les danses carrées, que l'on appelait des «sept» ou «huit» selon la formation des danseurs et la musique choisie. Ces danses n'étaientjamais accompagnées des appels d'un calleur, personnage qui, bien que répandu ailleurs en Acadie, semble n'avoir jamais existé dans la tradition des Franco-Terreneuviens. De plus, il y avait des stepdancers qui dansaient au rythme des gigues et des reels, danses que l'on appelle des «doubles» et des «quatre».4 Le danseur qui nous fait part du témoignage suivant se vante d'avoir connu «cent quinze steps» différents:

Je savais danser des quatre comme il faut là, des step dances là? Oh oui, ils étiont surpris là. Là, j'étais sérieux, moi. J'allais danser un step dance, bien, c'était sérieux, je le faisais, c'était fini. Je faisais pas de foleries là. Oui, c'est de même que j'ai venu, que j'ai venu puis j'étais, j'étais un beau stepdancer quand j'étais jeune. Oh, oui,... j'en ai gagné joliment. (Joachim Benoit)

Les gigues et les reels qui suivent sont représentatifs de la tradition musicale de la région de la baie Saint-Georges et de la péninsule de Port-au-Port.

ENDNOTES

NOTES

1. Pour une étude plus approfondie des chansons de Joséphine LaCosta, voir Butler.

2. Pour des discussions sur la légende du Juif Errant dans la chanson traditionnelle française, voir Rouart (20) et Conway (224). D'après Lacroix, la version du Juif Errant que chante madame Félix est une complainte brabantine datant du 22 avril 1774. Cependant, Anderson considère qu'elle a été composée plutôt vers 1800.

3. Pour plus de détails sur la musique et la vie d'Émile Benoit, voir Thomas (1983) et Quigley.

4. Pour une discussion de ces termes et leur signification dans la tradition franco-terreneuvienne, voir Quigley (407-15).

5. Ed. note: la musique est transcrite par J. P. O'Neill; Exx. 1-7 rev. J.R.

Bibliographie Sommaire

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Abstract: Gary R. Butler surveys French-language traditional music in Newfoundland. Based on hisfield research of 1979-85, Butler's report focuses on repertoires andperforming contexts ofoutstanding singers and instrumen

2. Ii reviendra-z-à Pacques, mironton, ton, ton, mirontaine,
Il reviendra-z-à Pacques, Ou pour la Trinité.

3. La Trinité se passe,/ Maibruck ne revient pas.

4. Ma dame à sa tour monte! Tant haut qu'elle peut monter.

5. Elle aperçoit son page/ Tout de noir habillé.

6. «Mon page, ô mon beau page,/ Quelles nouvelles apportez?»

7. «Laissez vos habits roses! Et vos satins brochés.

8. «Monsieur de Maibruck est mort/ Il est mort et enterré.

9. «Je l'ai vu porté en terre! Par quatre jeunes officiers.

10. «Un portait sa cuirasse,/ Et l'autre son bouclier.

il . «L'autre portait son grand sabre,! Et l'autre rien ne portait.

12. «Au milieu de sa tombe,! Un beau laurier plantait.

13. «Sur la plus haute branche,! Un rossignol chantait.

14. «Il chantait leur victoire,! Que Maibruck a rapporté.»

2. Je chantais sans ivresse, je chantais nuit et jour,

Cherchant, cherchant sans cesse à donner mon amour.

Qu' as-tu donc fait, ma mère, de nos premiers baisers?

J'ai compris que sur terre on n'est que pour pleurer.

Tout est bien fini, ça n'était qu'un rêve, ô,

Mon bonheur a fui, mon coeur est meurtri.

Pour moi tout est triste et ma vie s'achève,

A quoi sert d'aimer puisqu'il faut s'oublier.

3. L'amour n'était qu'un rêve, ô, plaisir à mon serment,
Ma pauvre vie s'achève, pour moi plus de printemps.
Ma pauvre âme est bien morte, mes voeux sont superflus,
On me passe à la porte, je ne vous connais plus.
Quand je m'en irai seul au cimetière,
Seul j'y resterai au fond de ma tombe.
Quand je dormirai sous ma froide pierre,
Viendras-tu prier, viendras-tu pleurer?

2. C'est le présent et le passé, je vois là-bas une chaumière.
C'est le berceau où je fus bercé aux doux refrains de ma tendre mère.
Un beau matin, m'ouvrant les yeux, je souriais, j'appelle ma mère.
On me dit qu'elle était aux Cieux, c'est ça queje voyais dans mon verre.

3. Par le passé j'ai eu vingt ans à l'âge où l'amour nous domine.
Par un beau matin du printemps j'épousa Jeannette, ma cousine.
Le Ciel a béni notre union, ma compagnarde m'a rendu père.
La joie régnait dans ma maison, . 'est ça que je voyais dans mon verre.

4. Par un beau matin du printemps la poudre éclate, la foudre tombe.
Le lendemain sous un drap noir on porta Jeannette dans sa tombe.
Ça fut pour moi un triste jour, mon enfant n'avait plus de mère.
Et moi, je n'avais plus d'épouse, c'est ça que je le voyais dans mon verre.

5. Mon fils grandit, ça le fut ma joie, un des beaux garçons du village.
Il avait les manières d'un roi, tant il avait un beau visage.
Le pays a eu besoin de lui, il s'est fait tué à la guerre.
Et moi, j 'ai resté sans appui, . 'est ça que je le voyais dans mon verre.

6. Parfois le Ciel bénit mes yeux, c'est une extraordinaire chose.
Et je le retrouverai dans les Cieux tout ce que j'ai perdu sur la terre.
Ma femme serait tout auprès de moi, c'est ça que je le voyais dans mon verre.

2. Embarquez dans ma barque, je vous l'apprenderai, bis
Je vous 1 apprenderai sur le bord de 1 tie.
Je vous l'apprenderai sur le bord de l'eau.
Toujours près des vaisseaux, charmant matelot.

3. J'entends ma mère m'appelle,/ elle m'appelle pour souper.

4. Ne craignez rien, la belle,/ avec moi vous soup'rez.

5. J'entends ma mère m'appelle,/ elle m'appelle pour coucher.

6. Ne craignez rien, la belle,/ avec moi vous couch' rez.

7. Elle prit un gros couteau,! et à son coeur s'l'a versé.

2. Ah, sur la mer il m'embarqua.
Le capitaine qui me monta.
Sautez, mignonne Cécilia:

Ô, . Cécilia. Ah, ah, Cécilia.

3. Le capitaine qui me monta,! Il dit, «a belle, embrassez-moi.»

4. Il dit, «a belle, embrassez-moi.» ! «Non! Que Papa le saura!»

2. Un jour près de la ville de Bruxelles en Brabant,
Des bourgeois fort dociles l'assistaient en passant.

Jamais ils n'avaient vu un homme si barbu.

3. Son habit tout difforme et très mal arrangé
Leur fait croire que cet homme était fort étranger.
Portant comme ouvrier devant lui un tablier.

Etc. 24 strophes: presque la mê me version que donne Gagnon, 131.

Endnotes

NOTES

1. Pour une étude plus approfondie des chansons de Joséphine LaCosta, voir Butler.

2. Pour des discussions sur la légende du Juif Errant dans la chanson traditionnelle française, voir Rouart (20) et Conway (224). D'après Lacroix, la version du Juif Errant que chante madame Félix est une complainte brabantine datant du 22 avril 1774. Cependant, Anderson considère qu'elle a été composée plutôt vers 1800.

3. Pour plus de détails sur la musique et la vie d'Émile Benoit, voir Thomas (1983) et Quigley.

4. Pour une discussion de ces termes et leur signification dans la tradition franco-terreneuvienne, voir Quigley (407-15).

5. Ed. note: la musique est transcrite par J. P. O'Neill; Exx. 1-7 rev. J.R.

BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE

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Abstract: Gary R. Butler surveys French-language traditional music in Newfoundland. Based on hisfield research of 1979-85, Butler's report focuses on repertoires andperforming contexts ofoutstanding singers and instrumen

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2. Ii reviendra-z-à Pacques, mironton, ton, ton, mirontaine,
Il reviendra-z-à Pacques, Ou pour la Trinité.

3. La Trinité se passe,/ Maibruck ne revient pas.

4. Ma dame à sa tour monte! Tant haut qu'elle peut monter.

5. Elle aperçoit son page/ Tout de noir habillé.

6. «Mon page, ô mon beau page,/ Quelles nouvelles apportez?»

7. «Laissez vos habits roses! Et vos satins brochés.

8. «Monsieur de Maibruck est mort/ Il est mort et enterré.

9. «Je l'ai vu porté en terre! Par quatre jeunes officiers.

10. «Un portait sa cuirasse,/ Et l'autre son bouclier.

il . «L'autre portait son grand sabre,! Et l'autre rien ne portait.

12. «Au milieu de sa tombe,! Un beau laurier plantait.

13. «Sur la plus haute branche,! Un rossignol chantait.

14. «Il chantait leur victoire,! Que Maibruck a rapporté.»

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2. Je chantais sans ivresse, je chantais nuit et jour,

Cherchant, cherchant sans cesse à donner mon amour.

Qu' as-tu donc fait, ma mère, de nos premiers baisers?

J'ai compris que sur terre on n'est que pour pleurer.

Tout est bien fini, ça n'était qu'un rêve, ô,

Mon bonheur a fui, mon coeur est meurtri.

Pour moi tout est triste et ma vie s'achève,

A quoi sert d'aimer puisqu'il faut s'oublier.

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3. L'amour n'était qu'un rêve, ô, plaisir à mon serment,
Ma pauvre vie s'achève, pour moi plus de printemps.
Ma pauvre âme est bien morte, mes voeux sont superflus,
On me passe à la porte, je ne vous connais plus.
Quand je m'en irai seul au cimetière,
Seul j'y resterai au fond de ma tombe.
Quand je dormirai sous ma froide pierre,
Viendras-tu prier, viendras-tu pleurer?

2. C'est le présent et le passé, je vois là-bas une chaumière.
C'est le berceau où je fus bercé aux doux refrains de ma tendre mère.
Un beau matin, m'ouvrant les yeux, je souriais, j'appelle ma mère.
On me dit qu'elle était aux Cieux, c'est ça queje voyais dans mon verre.

3. Par le passé j'ai eu vingt ans à l'âge où l'amour nous domine.
Par un beau matin du printemps j'épousa Jeannette, ma cousine.
Le Ciel a béni notre union, ma compagnarde m'a rendu père.
La joie régnait dans ma maison, c 'est ça que je voyais dans mon verre.

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4. Par un beau matin du printemps la poudre éclate, la foudre tombe.
Le lendemain sous un drap noir on porta Jeannette dans sa tombe.
Ça fut pour moi un triste jour, mon enfant n'avait plus de mère.
Et moi, je n'avais plus d'épouse, c'est ça que je le voyais dans mon verre.

5. Mon fils grandit, ça le fut ma joie, un des beaux garçons du village.
Il avait les manières d'un roi, tant il avait un beau visage.
Le pays a eu besoin de lui, il s'est fait tué à la guerre.
Et moi, j 'ai resté sans appui, c 'est ça que je le voyais dans mon verre.

6. Parfois le Ciel bénit mes yeux, c'est une extraordinaire chose.
Et je le retrouverai dans les Cieux tout ce que j'ai perdu sur la terre.
Ma femme serait tout auprès de moi, c'est ça que je le voyais dans mon verre.

2. Embarquez dans ma barque, je vous l'apprenderai, bis
Je vous 1 apprenderai sur le bord de 1 tie.
Je vous l'apprenderai sur le bord de l'eau.
Toujours près des vaisseaux, charmant matelot.

3. J'entends ma mère m'appelle,/ elle m'appelle pour souper.

4. Ne craignez rien, la belle,/ avec moi vous soup'rez.

5. J'entends ma mère m'appelle,/ elle m'appelle pour coucher.

6. Ne craignez rien, la belle,/ avec moi vous couch' rez.

7. Elle prit un gros couteau,! et à son coeur s'l'a versé.

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2. Ah, sur la mer il m'embarqua.
Le capitaine qui me monta.
Sautez, mignonne Cécilia:

Ô, ~ Cécilia. Ah, ah, Cécilia.

3. Le capitaine qui me monta,! Il dit, «a belle, embrassez-moi.»

4. Il dit, «a belle, embrassez-moi.» ! «Non! Que Papa le saura!»

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2. Un jour près de la ville de Bruxelles en Brabant,
Des bourgeois fort dociles l'assistaient en passant.

Jamais ils n'avaient vu un homme si barbu.

3. Son habit tout difforme et très mal arrangé
Leur fait croire que cet homme était fort étranger.
Portant comme ouvrier devant lui un tablier.

Etc. 24 strophes: presque la mê me version que donne Gagnon, 131.

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